Portrait de Nicolas Arnold. HP.1961.7.302, collection MRAC Tervuren ; photo J. Hersleven, s.d. Tous droits réservés.
Ayant commencé sa carrière comme employé de banque, Nicolas Arnold (1860-1940) est entré à l’administration centrale du Congo en 1884, sous Strauch et Thys. Il y est nommé directeur (1896), puis affilié à l’administration des finances (1901) avant de devenir directeur général en 1904. À la suite de la reprise de l’EIC par la Belgique en 1908, Arnold est nommé secrétaire général du ministère des Colonies (1911-1926). C’est à ce titre qu’il est associé à l’acquisition d’une importante collection pour le Musée du Congo belge de Tervuren entre 1914 et 1919 : celle du marchand anversois Henri Pareyn comprenant plus de 2 500 objets.
Nicolas Arnold a été l’acteur décisif de cette transaction. En plus d’avoir accepté le principe de cet achat par le musée, il a lui-même servi d’intermédiaire financier (sans doute en tant que « prête-nom » pour un mécène resté anonyme).
Au départ peu favorable à cette acquisition - même si cela avait été en une période plus propice (temps de paix) -, Arnold s’est finalement laissé convaincre par l’insistance du directeur du musée, Alphonse de Hauleville. Arnold lui rappelle ainsi, dans un courrier du 10 février 1918, que le financeur a fait un véritable « sacrifice » en achetant cette collection et que toutes les garanties nécessaires doivent donc lui être envoyées.
Mais dans un autre courrier en date du 27 février 1918, l’avis d’Arnold change positivement :
« Je suis encore sous la bonne impression de ce que j’ai vu ce matin au Musée. En somme, j’en arriverai à admettre que nous devons être reconnaissants à l’intermédiaire Pareyn d’avoir découvert, pour le Musée (si bien entendu le Gouvernement en exprime plus tard le désir) des objets de collections aussi précieux que, ni la Direction du musée, ni l’administration centrale du Département n’auraient pensé à aller dénicher chez leurs propriétaires. J’attache bcp de prix à ce que ces derniers (nous les connaissons maintenant) furent généralement des officiers ou des fonctionnaires intelligents, instruits, plein d’initiative et ayant recueilli leurs collections, il y a 15 à 25 ans, dans des régions à cette époque-là, à peine connues […]. J’allais oublier de vous remercier vivement, ainsi que Mr Maes, d’avoir insisté pour que cette importante et intéressante collection ne quitte pas le Pays ! Voilà qui est fait ! »
Il est intéressant de relever que ces informations de provenance qui réjouissent tant le secrétaire général et le confortent dans sa bonne impression de la collection sont aujourd’hui presque totalement absentes des archives (voir l’article d’Henri Pareyn pour plus de détails).
À l’arrivée de la collection Pareyn au musée le 20 février 1918, le conservateur Joseph Maes procède à son enregistrement comme « Dépôt de Mr le Secrétaire général Arnold ». La transaction ne sera finalisée qu’en 1919, après la fin de la guerre, mais le nom d’Arnold lui restera associée.
Hormis cette collection, Nicolas Arnold ne s’est jamais autant et/ou directement impliqué dans d’autres acquisitions pour le musée. Sans avoir jamais voyagé au Congo, Nicolas Arnold termine sa carrière en tant qu’Administrateur général des Colonies en 1926.
Dellicour, F. 1955. « Arnold (Nicolas) ». In Biographie coloniale belge. Bruxelles : Institut royal colonial belge, tome IV, col. 5-8. En ligne : https://www.kaowarsom.be/fr/notices_arnold_nicolas.
Van Beurden, S., Gondola, D. & Lacaille, A. 2023. « Provenance, politique et possession d’objets ethnographiques : une introduction ». In S. Van Beurden, D. Gondola & A. Lacaille, (Re)Making Collections. Tervuren : Musée royal de l’Afrique centrale, pp. 47-80.
Musée royal d'Afrique centrale. (s.d.), Archives historiques, Dossier d'acquisition (DE 378).
Archives générales du Royaume. (1887). État civil, acte de mariage (No 1274, 14/09/1887)
Archives du ministère des Affaires étrangères de Belgique, N.J. Arnold, (Minaf28).
Le projet PROCHE (Recherche de PROvenance sur la Collection Ethnographique – Herkomstonderzoek op de Ethnografische Collectie) répond à une demande à la fois politique et sociétale. Ce projet vise à mieux connaître et faire connaître à tous les publics les manières dont les collections ethnographiques et musicologiques ont été acquises pendant la période coloniale en RDC. À cette fin, cette base de données reprend l’inventaire des objets du Congo et d’Afrique centrale conservés au Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC) de Tervuren qui a été remis en février 2022 au Premier ministre congolais Jean-Michel Sama Lukonde. Cette mise en ligne est une mise en partage indispensable des données, un point de départ destiné à être progressivement complété par la publication de nouveaux champs. Cette base de données sera ainsi régulièrement mise à jour en fonction de l’avancée du projet et des recherches plus approfondies qui seront effectuées sur les collections.
Il s’avère que certains termes appliqués à ces objets ethnographiques et musicologiques, ainsi que certaines informations qui leur sont associées, posent problème quant à leur signification et leur exactitude. Les informations documentant ces objets sont de nature intrinsèquement coloniale et contiennent des terminologies stigmatisantes pour leurs communautés d’origine ou les diasporas concernées. Nous tenons cependant à préciser que ces informations ne sont pas représentatives de l’opinion du MRAC et du projet PROCHE. En effet, le projet défend une position anticoloniale et antidiscriminatoire et il affirme son soutien aux communautés historiquement marginalisées et privées de leurs droits. Nous sommes donc conscients que notre catalogue peut provoquer des tensions psychologiques et physiques. C’est pourquoi, nous invitons les lectrices et lecteurs à prendre en compte le contexte dans lequel le catalogue est présenté.
Cet inventaire est, en soi, une source historique et une construction d’un passé plus ou moins récent. En effet, il contient des informations relevant de diverses strates historiques jusqu’à aujourd’hui et pourrait être compris, perçu et lu comme un palimpseste. Cela rend son étude conflictuelle et laborieuse, car elle conduit aussi inévitablement à reproduire des classifications, des désignations qui sont biaisées et parfois préjudiciables.
Il est important de le contextualiser, compte tenu de la situation historique profondément inéquitable au cours de laquelle ces objets ont été prélevés et qualifiés.
Actuellement, ces termes problématiques servent davantage de traces de l'histoire et de supports de recherche que de véritables qualificatifs des objets et/ou des cultures dont ils sont issus, et c’est pour cela qu’il apparait important de les conserver en l’état. Mais une approche critique est de mise à leur égard et pour cette raison, un texte explicatif et/ou d’avertissement est ajouté à certains champs jugés problématiques.Parallèlement, dans une démarche collaborative, toute personne intéressée par la correction ou la précision d'une information est invitée à nous contacter à l'adresse électronique suivante : proche@africamuseum.be